Obiou : montagne mythique.
L'Obiou est une montagne vraiment fascinante.
Situé à la charnière des mondes de l'edelweiss et de la lavande(1), l'Obiou s'élève en majesté aux confins sud du plateau matheysin.
IL a toujours accompagné nos vies.
Eté comme hiver nos regards se portent vers lui.
Divinité tutélaire: il semble régler la marche du temps et des saisons.
De quelle humeur est-il aujourd'hui?
Porte-t-il son chapeau de nuages de travers (signe de mauvais temps)?
A-t-il noué son écharpe de brume autour de son immense cou de taureau?
Pourquoi se pare-t-il si souvent, au printemps, d'une étrange coloration dans un contre-jour un peu fantomatique ?
Montagne magique où même la voie "normale" est truffée d'astuces d'itinéraire.
Montagne mythique pour les randonneurs ou chaque passage possède une histoire, parfois une légende et toujours un nom :
Bénitier, Bachilianne, col des Faïsses, Pas du Vallon, Petit Endroit, Casse Fouira, Couravou, combe Fuvelle, combe de la Prison, Malpasset, Bonnet de l'Evêque, Casse Varnage, arête Fluchaire, grotte des Sarrazins etc etc...
Il représente aux yeux des Matheysins l'archétype même de la "haute" montagne solitaire, majestueuse et... inaccessible.
Omniprésent, on le voit du sommet du Tabor
de la colline des Creys
Des Gonthéaumes
Du bord du lac de Petichet
On a toujours eu envie de l'encadrer au fond de l'horizon, de le dessiner, de le peindre ou d'écrire sur lui .
Il a inspiré de nombreux artistes...
Obiou vu par l'artiste Murois Ibanez.
Huile sur toile par Marcelle Sellon.
Vue de l'Obiou par le peintre de Cholonge Vibout (1930).
Obiou vu de Laffrey, Gravure (1854) de I. Taylor illustrant un ouvrage intitulé "Voyages pittoresques et romantiques de l'ancienne France"
Obiou vu de Corps par Maugendre en 1860.
Obiou, un jour de pèlerinage à Notre Dame de la Salette par Guédi en 1860.
Oeuvre très certainement dessinée par Y. Allouard
Affiche dessinée par Victor Miard (Draim)
Etc etc...
Les éditeurs de cartes postales s'emparent aussi de l'Obiou. Avec plus ou moins de bonheur d'ailleurs... Il est vrai qu'il n'est pas facile de lui tirer le portrait puisqu'il est presque toute la journée en contre-jour !
Deux locomotives du petit train S.G.L.M. se sont appelées Obiou :
Une locomotive à vapeur 031 Fives lille dont voici une photographie datée de 1905.
Une locomotive électrique Thury, la E5, photographiée devant sa remise à Saint Georges de Commiers en 1933.
Les gravures représentant la journée historique ou Napoléon, de retour de son exil à l'île d'Elbe, rencontre les troupes royales à Laffrey ne manquent jamais de le représenter en toile de fond.
Gravure représentant la prairie de la rencontre telle qu'elle était en 1815 avant que ne soit érigé la statue équestre de Napoléon par Frémiet (lithographie de A. Debelle).
Même si le voile atmosphérique des après midi d'été le masque un peu, les touristes venus admirer la statue de Napoléon par Frémiet ne manqueront pas de le ramener avec eux (clic clac merci Kodak)...
Combien parmi eux sauront son nom ?
Les écrivains régionaux et les éditeurs se sont souvent emparés de son image.
Le plateau matheysin de pierre Berthier
Le guide de l'Obiou de Pierre Barnola
La Mure autrefois de Jean Garnier
Le pays de La Mure coeur du Dauphiné de Bernard de la Fayolle
Chronique des mines de La Mure de Jean Garnier
Du Mont Aiguille à l'Obiou de Pascal Sombardier
Lacs de Matheysine de Claude Péquignot
Un roman enfin : Crash à l'Obiou de Vincent Desbrieres
Etc etc...
Les clubs sportifs, les maisons de retraites, les immeubles, certains commerce (pharmacie!) n'hésitent pas à s'identifier à lui... L'Obiou est omniprésent en Matheysine...
L'Obiou fascine et déclenche parfois des commentaires surprenants :
Dans l'ouvrage "Lettres à Lucie" André Blanc Pasteur à Mens de 1817 à 1846 affirme sans broncher : "Au dessus de Châtel s'élève le Mont Obioux (sic), à 2917 mètres au dessus de la Méditerranée d'où les marins l'aperçoivent avant d'enter dans le port de Marseille ou de Toulon"...
Un article du Courrier de l'Isère daté du 3 juin 1852 n'hésite pas à qualifier l'Obiou de "géant" de la chaîne des Alpes.
L'évêque de Birmingham, Mgr Ullathorne, compare l'Obiou à la tour de Babel et la tour de Pise...
Le guide Joanne, en 1863, affirme qu'il faut cinq heures pour atteindre le sommet et déclare sans sourciller que le Malpasset est devenu infranchissable et, bien entendu, que du sommet on voit Marseille et la Méditerranée!
Le 15 octobre 1899 la Revue des Alpes Dauphinoises affirme :
Que l'on voit l'Obiou de Grenoble...
Que son ascension est difficile et dangereuse. Que les hardis ascensionnistes doivent y affronter des précipices vertigineux et des chutes de pierres provoquées par les touristes perchés plus haut dans la paroi! (touristes heureusement munis d'un cor de chasse pour prévenir les suivants à chaque déclenchement!)
L'Obiou était déjà très fréquenté au XIX éme, cependant les récits des ascensions effectuées sont souvent héroïques et peu crédibles!
Le révérend Coolidge, alpiniste de très grand renom, se contentera d'écrire sans aucun commentaire qu'il a gravi l'Obiou.
Voilà qui remet les pendules à l'heure!
(1)(comme l'ont si joliment écrit P. Barnola et J.M Faure dans la monographie consacrée à l'Obiou qu'ils ont écrit en 1981).