Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Matheysine et Hauts Pays ...
Accès direct à tous les articles de ce blog :
Introduction
En hommage à René Reymond...
la République d'enfants de Moulin-Vieux
Vers l'aiguille de la Dibona et le refuge du Soreiller
Au milieu d'une harde de chamois...
Le col de la Vaurze en partant du Désert en Valjouffrey.
Vers le lac et la brèche Gary.
Le regard d'une brebis
Le secret de la dernière restauration de l’église de Pierre-Châtel enfin percé !
La montagne défigurée...
LeTitanic "refait surface" en Matheysine.
Comment j'ai fait fortune dans le Trièves grâce à Jean Giono...
Valjouffrey-un livre d'Hervé Champollion
Concert Olivier Messiaen le 09/06/13 en l'église de Saint Théoffrey
Invitation à lire "Roizonne -Histoire illustrée de la vallée du mandement de Rattier-" de Danièle Vuarchex.
Roizonne – Histoire illustrée de la vallée du mandement de Rattier. Un livre de Danièle Vuarchex
Les Alpes de Doisneau. Robert Doisneau en vacances à Laffrey...
Paul Fabre : jean, berger d'Entraigues.
Le poids du papillon. Un conte poétique, deux destins parallèles...
Etrange tête à tête en redescendant du Tabor
Le col des Sept Laux
le col de la Muzelle au départ de Valsenestre
Deux expositions d'aquarelles de Gilbert Skorski en 2012...
Le col de Côte Belle
Bêtes et hommes, mon chien...
Légende de Noël au Pays Noir...
L'association des Amis du Musée Matheysin reçoit le prix 2011 de l'Académie Delphinale.
Au bord de la route...
Le refuge de Font-Turbat Mémoire -mémoire alpine du Haut-Valjouffrey
Du pique nique du Grand-Ferrand vers les cols La Croix, des Aurias et de Charnier...
Des convictions que l'on emmène jusque dans la tombe!
Les Gonthéaumes incendiés en 1882 ? Recherches dans les archives...
Faire-part de naissance du blog "Aquarelles de montagne, souvent de sports de montagne, d'un natif du pied de l'Obiou".
Edith Berger. Peintre du Trièves
L'homme qui plantait des arbres de Jean Giono -compléments-
Gilbert Skorski expose ses aquarelles à La Mure.
Fascinant Obiou : un rêve de randonnée.
Crash sur l'Obiou : 60eme anniversaire - Mémorial de la Salette Fallavaux
Obiou : montagne mythique.
La petite hermine du Tabor...
L'homme qui plantait des arbres -Jean Giono-
Quelle est triste la montagne !
Pratiquer le haïku en montagne?
Calès, le jongleur de Tencin, peintre des montagnes.
Hier c'était le printemps.
La gloire de mon arrière-grand père.
Crash sur L'Obiou
Historique succinct des Mines en Matheysine
Les Gonthéaumes : recherches sur d'anciens travaux miniers...
Le carré magique de Valbonnais
Meeting aérien sur le lac de laffrey : les canadairs font leur schow…
Le puits du Villaret.
Le puits des Rioux
Le puits Sainte-Marie à la Motte d'Aveillans.
L'anthracite : l'or de la Matheysine...
La grotte de la Fétoure
En allant vers le lac du Vallon et le col du Rochail...
Adieu Emile Masse...
Matheysine, terre d'inspiration.
Le sentier des Pères vers Notre Dame de la Salette
Olivier Messiaen en Matheysine. Hommage des 20-21/09/2008
Une grande faim en (de !) montagne...
La Matheysine vue du ciel...
Juillet Août mois des obsessions
Institutrices en Oisans...
Vous connaissez Petichet ?
Les Gonthéaumes, hier (1958) et aujourd'hui
Petit Train S.G.L.M : Visite des ateliers
Vers le lac et le glacier d'Arsine
Le canal du Beaumont
Un article du Dauphiné Libéré de 1957 parlant de l'église romane de Saint Théoffrey...
La vieille église Romane de Saint Théoffrey
Les yeux de l'oncle Jules...
Une randonnée pleine d'émotions vers le refuge du Pavé.
Excursion au Piquet de Nantes en souvenir de l'abbé Pierre.
En Matheysine l'air est pur, le climat est sain… Une centenaire en 1946
Des traces étranges sur la colline des Creys en Matheysine...
Lac Claret et lac du Poursollet, randonnée pour automobilistes
Une "auberge rouge" en Oisans ?
Le plus vieux berger des Alpes : Emile Masse
Quelques jeunes bouquetins acrobates et curieux...
Le Grand Serre en Matheysine, la cabane de la Grande Cuche
La mine de l'oncle "Top" : Prenez donc le temps de la chercher dans la colline des Creys...
Mon ami Bernard : pélerinage de printemps au sommet du Tabor de Matheysine
L'hiver en Matheysine avait été rude cette année là ...
Bibliographie,documentations (Giono)...
La tête dans les nuages...
Un journée de poisse ! Glandu n'a pas de chance...
Le Trièves : Première approche aux pieds du Grand Ferrand
Marmottes
Au bout de la randonnée : Son Altesse Chamois
Pourquoi faut-il que les hommes s'ennuient ?
La légende de la Pierre Percée.
Publication : Mémoire d'Obiou.
La Gribouille : une chaleureuse librairie à La Mure.
Quelques photos en Matheysine - Petite présentation
Bibbliographies, documents (divers auteurs)...
Bibliographie,documentations (Samivel)...
Bibliographie, documentations (René Reymond)...
Une épopée moderne au Tabor de Matheysine !
18 décembre 2011

Légende de Noël au Pays Noir...

Il ya bien longtemps on criait Noël, Noël ! à l’occasion de tout événement heureux…

Aujourd’hui, au mieux, Noël est une fête religieuse… Mais le plus souvent, hélas, ce moment de l’année est plutôt synonyme d’orgie consommatrice…

Voilà pourquoi je me sens toujours mal à l’aise à cette époque de l’année...

Je rêve parfois d’une veillée de Noël en format "carte postale", de messe de minuit, d'église romane enfouie dans un paysage enneigé, de sapins bien vivants étincelant de givre ou de villages engourdis par le froid de l'hiver naissant…

St Hugues de Chartreuse

Saint Hugues en Chartreuse (1)

 

St Maurice en Valgaudemar

Saint-Maurice-en-Valgaudemar (1)

 Dans mes Noël rêvés le ciel est moucheté d’étoiles bien brillantes et on entend des chants de Noël en sourdine et des cris d’enfants heureux… On y croise des pères Chartreux, des bonhommes de neige réunis dans le même spaciement, randonnant dans l'infini …

Chartreux

Chartreux.jpg (1)

Bonhomme neige

 

Mais le plus souvent en cette fin décembre, comme d'un chacun, je me retrouve coincé dans des embouteillages entre un parking de supermarché et une rocade urbaine au fin fond d’une ZI lugubre…

Pour vous mettre au diapason de mon état d’esprit lisez cette légende : "Soirée de Noël dans les environs de La Motte d’Aveillans".  C’est pas très gai mais dans cette histoire hommes et bêtes sont courageux et loyaux… et je ne sais pas pourquoi mais à mes yeux Noël a toujours eu cette connotation ambivalente. Le cœur oscillant entre joie et tristesse…

 

Noël au Pays noir.

Le glas s'était tu... Les hommes, harassés, regagnaient leurs chaumières...

Comment avaient-ils pu, dans cette bourrasque, creuser la fosse de Jérémie, le bûcheron des Creys? Au prix de quels efforts étaient-ils parvenus à descendre – dans la neige qui les aveuglait et les faisait trébucher à tout instant - son corps raidi par la mort et le froid ?...

Les femmes, quittant le cimetière, se hâtaient, parlant encore à voix basse : «C'est trop de misère, tout de même ! Une veille de Noël !... Pauvre Mélanie ! Quelle triste soirée va-t-elle passer, seule avec son petit-fils, en sa cabane isolée !».

Mais personne ne pouvait songer à reprendre, dans la nuit commençante, le sentier introuvable de la forêt.

Et Mélanie était seule, à la nuit tombée...

Cela se passait, il y a bien des siècles, lorsque les peupliers recouvraient La Roche; les sapins et les mélèzes : La Mayrie et Le Villard; au temps où l'ancêtre de l'«Orme» fameux - qui devait laisser son nom à l'«Ourme» - n'était encore qu'un arbuste.

En ce lointain Moyen Age, tout le monde était plus ou moins bûcheron et cultivateur dans les petits hameaux du Pays Noir (ainsi nommé à cause de la teinte de ses roches et de l'aspect de ses bois). Mais, en ce soir du 24 décembre, du Connexe au Bois Noir, de Pierre-Percée au Drac, tout était désespérément blanc sous la rafale de neige.

Il fallait être égaré ou héroïquement charitable pour affronter un temps pareil...

Le glas s'était tu...

Mélanie ne l'avait pas entendu vibrer dans l'air ouaté de flocons. Mais elle l'entendait pleurer en son cœur douloureux...

Assise près du feu qu'elle oubliait de ranimer, elle regardait sans le voir son petit-fils endormi dans l'humble «balancelle». Elle revivait ces derniers jours... Son mari. aussi courageux que bon, avait trop présumé de ses forces vieillissantes : il avait glissé avec le lourd «billot» qu'il voulait scier et l'avait reçu en pleine poitrine... «Ce ne sera rien» avait-il assuré... Son souffle court et son visage congestionné démentaient ses paroles.

Que faire ?... Il y avait bien, au Mas près la Pierre Merlière, un «Guérisseux» réputé (mire? Apothicaire? Ou... un peu sorcier?). Mais ses services se payaient. Et Mélanie n'avait point d'écus sonnants en sa pauvre escarcelle... «Laisse, femme, ce ne sera rien», répétait le malade. Pourtant, elle eut beau le réchauffer de son mieux, épuiser en infusions toute sa provision de genièvre, le lendemain, Jérémie trépassait dans un dernier râle après lui avoir recommandé : «Prie pour le repos de mon âme... »

«Sois toujours compatissante et bonne»... et - dans un souffle - «Je te serai en aide»...

Brisée de fatigue et de chagrin, elle écoutait, dans une demi-somnolence, les bruits de la forêt. Elle croyait entendre le vent murmurer cette phrase : «Je te serai en aide» - «Comment ?...» Questionnait-elle. La réponse ne venait pas dans sa tête douloureuse. «Mon pauvre homme, il déparlait», pensait-elle tristement.

Elle finit par s'endormir tout à fait...

La bise se mit à hurler, sinistre, dans les sapins.

La pauvre chaumière tremblait sous l'effort de la rafale...

L'enfant dormait toujours...

Il ne savait pas que sa mère était morte à sa naissance et que son père. Parti guerroyer avec le seigneur de Monteynard, ne reviendrait jamais... La tendresse vigilante de son aïeule lui tenait lieu d'univers.

Soudain, dans l'écurie attenante à l'unique pièce, la chèvre et les deux brebis se mirent à hurler de terreur... La femme réveillée en sursaut, tremblante sans savoir pourquoi, jeta un fagot dans l'âtre d'un geste irraisonné, pour se réchauffer et faire de la lumière... la lumière qui chasse la peur avec l'ombre... et qui chasse aussi le rêve !... Douloureuse, la réalité se fit jour ! Mélanie était seule au monde avec cet orphelin qui dormait. Il faudrait l'élever... Avec quoi, Mon Dieu ?... Elle prêta l'oreille... Devenait-elle folle... ? «Ces hurlements dans le lointain... Non ce n'est plus seulement la bise... ce sont les loups... ! Pourvu qu'ils ne s'approchent pas... ! Pourvu que la porte résiste !» Ah! si du moins, son brave Taïaut était là pour défendre l'enfant ! Mais le bon chien avait suivi le cortège funèbre et n'était point remonté... Etait-ce une hallucination... des aboiements furieux se rapprochaient... Mais aussi, assourdis par la neige, des pas, des pas humains ! L'aïeule effrayée retenait sa respiration... Tous les bruits se rapprochaient...on cogna durement à l'huis. Elle fit un bon en arrière terrifiée... Taïaut jappait, là, tout près. Une voix haletante jeta : «Noël ! Ouvrez ! Par pitié ouvrez vite !»Noël... Soudain, courageuse, elle tira promptement le verrou et entrebâilla la porte. Deux «paquets de neige» entrèrent; le plus grand (homme ou ours) referma l'huis d'un vigoureux coup d'épaule; puis (car c'était bien un homme) ôta son bonnet de fourrure et salua : «Noël à vous, Dame de céans ! Noël à tous les vôtres ! Vous me sauvez la vie !» - «Que l'hôte de Noël soit le bienvenu en ma triste demeure» répondit-elle. L'enfant mi-éveillé par le bruit et le froid, se retourna, pleurant. Taïaut - car c'était lui - s'ébrouant, balança le berceau et caressa le petit qui rassuré, s'endormit souriant. Derrière la porte bien close le chien reprit sa faction, menaçant... L'étranger quitta son manteau de peau d'ours. Contre son justaucorps, bien à l'abri, il serrait une viole.

Ses chausses n'étaient plus qu'un bloc de neige glacée... Il frissonnait...

Alors compatissante et bonne, sans questionner l'hôte de Noël - reçu comme le Seigneur Lui-même - la femme alla quérir, près des bêtes calmées, toute la provision de bois réservée à Noël et prépara une boisson bien chaude avec les plantes aromatiques cueillies en été. Puis, simplement avec la générosité des humbles qui ne calculent pas, elle offrit à l'inconnu les dernières chausses de son défunt... tout ce qu'il n'avait pu emporter avec lui.

Emu, l'homme qui se sentait revivre, remercia l'aïeule et s'excusa de venir ainsi, de nuit, troubler sa solitude et son chagrin.

Il avait beaucoup voyagé de France en Dauphiné et avait appris bien des choses...

Tour à tour montreur d'ours, jongleur, ménestrel il allait de prieuré en abbaye, de village en castel, chantant, colportant les nouvelles.

Venu du prieuré de Commiers à Notre-Dame de Perailler, il avait fait halte, la veille au soir, au château de La Motte où il avait appris comment le seigneur du lieu, revenu lépreux de la croisade, avait été merveilleusement guéri par l'eau chaude d'Avignonnet au bord du Drac. Comptant passer la Sainte Nuit en l'église du Pays Noir, il s'était égaré dans les bois. Poursuivi par les loups, il eut la chance de rencontrer Taïaut et de s'en faire un allié qui l'avait guidé jusqu'ici, marchant à reculons pour faire face aux méchantes bêtes...

Tout en écoutant, Mélanie avait sorti la tomme de chèvre, les dernières galettes de blé noir et mis chauffer dans l'âtre la soupe de gruau.

Brisé par la fatigue, attentif à la discrétion (ne voulant pas dévorer les maigres provisions) l'hôte ne tarda pas à s'étendre sur la couche de paille, à même le sol...

L'aïeule s'assoupit près du feu...

L'étranger ne dormait pas... son regard s'était fixé au sol rocailleux de la chaumière.

Soudain, une gerbe d'étincelles envolée de l'âtre fit luire le rocher... Il se souleva de surprise : «La Pierre Noire ! Serait-ce la pierre noire ?» Il n'en croyait pas ses yeux... c'était bien la pierre noire...

Convaincu, il se dressa tout à fait : «C'est la pierre noire... il faut qu'elle chauffe !» - II se mit à gratter le sol, ramassa les morceaux détachés et s'approcha du foyer : «La pierre noire ! Il ne fera plus froid !»

Rapprochant les blocs de pierre qui formaient l'âtre, de tout son souffle il attisa le feu de bois qui se mit à pétiller, il jeta par-dessus les «pierres noires» puis décrochant la marmite, il la plaça sur le feu en guise de couvercle.

La veuve épouvantée, n'osait bouger... Aurait-elle (comble de malheur !) recueilli un dément?... Il ne faut point, dit-on, contrarier ces gens-là !... ou bien... serait-ce un alchimiste ? C’est-à-dire... un peu le diable...? D’après ce qu'elle avait entendu raconter au temps où elle était accorte servante chez la noble Dame de Monteynard.|

L'homme avait saisi la masse et le pic du bûcheron. Sans nul souci du sommeil de l'enfant, il creusait dans le roc et brisait les petits blocs, un sourire au coin des lèvres : «La pierre noire ! Quelle fortune !»|

Taïaut ne protestait pas... les loups étaient partis, n'ayant jamais ouï, en ces lieux,  pareil vacarme après le couvre-feu ! La bise ne soufflait plus; la neige s'était arrêtée.

Une douce chaleur envahit la chaumière...

L'hôte souleva la marmite : Des pierres noires devenues incandescentes s'échappaient de courtes flammes bleues-mauves. Il rajouta d'autres pierres noires disant : Noël ! 0 Dame compatissante et bonne, Dieu vous est en aide ! Vous n'aurez plus jamais froid, céans...»

L'enfant riait, tendant ses petits bras vers l'âtre... Cloches et clochettes carillonnaient minuit dans la vallée.

Dans la demeure endeuillée, devant le berceau de l'enfant, le ménestrel chanta sur sa viole son plus beau Noël. Puis... il s'en fut, laissant sa bourse aux mains réchauffées du petit.

Le jour se leva radieux; des perles brillaient à toutes les branches.

Et lorsque midi fit étinceler la neige sur les sapins, dans la combe proche de la chaumière, l'anthracite irisé de La Motte scintillait au soleil.

 Au Pays Noir, les cloches chantaient... !

 (Les Mottes, 1952).

Cette légende est issue de l'ouvrage de René Reymond intitulé "Mystères et Curiosités de l'Histoire" :

mysterescriositesrene

 

(1)   Aquarelles tirées du bel ouvrage "Evasions Nouvelles" de Madeleine Merle :

Evasions Nouvelles Merle

 

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité